Saint-Didier

De imagina
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J'ai retrouvé ce texte que j'ai écrit le 5 février 2012, la suite d'une expérience particulière qui a laissé des traces dans ma vision du monde encore actuellement. Je pense que ce genre de chose ne s'oublie jamais, une fois vécue.

Saint-Didier

Il faudrait ne vivre toujours que des moments comme ceux-là, des moments où l'émotion ressentie face à une réalité oubliée, une réalité masquée par nos illusions, ressurgit et nous révèle une face cachée de nous même enfouie sous des couches de monstrueuse ignorance, d'orgueil et de soif irascible envers un rêve impossible, un cauchemar.

Église, prêtre, des mots qui ont une résonance particulière dans ma vie des mots qui s'éclairent sous un jour nouveau grâce à cette musique de Rossini qui fait vibrer la pierre et lui redonne sa dimension sacrée d'autrefois. Imaginez un simple paysan qui après une semaine de labeur d'une pénibilité que nous ne pouvons même plus comprendre, imaginez le un dimanche matin, dans l'église de son village, entendant une telle musique. Paix, soulagement, ascension vers un paradis inaccessible, ces mots là aussi, peut-être inconsciemment, devaient résonner en lui avec avec un sens magique. N'est-ce pas cela l’élévation ? Le rêve vous dites ? Non, les vrais rêveurs sont ceux qui ne croient pas en cela. Ils sont ceux qui pensent que la lumière n'est qu'une énergie électromagnétique ne servant qu'à exciter nos rétines afin de leur permettre de ne pas rater le métro pour rentrer chez eux le soir après une journée d'un travail qui n'épuisent que leurs nerfs. Notre paysan ne rêve pas, lui. Il la ressent son élévation. Il la désire peut-être comme il s'émeut devant le sourire si bienveillant, si doux, si engageant de cette Vierge Marie en granite blanc.

Je m'égare. Revenons à l'essentiel. La lumière, c'est autre chose. Dans l'église, il fait froid. Ses piliers de travers me suggèrent ses anciennes souffrances. Sa lumière m'inspire, me séduit. Combien de siècles a-t-elle vécu ? Je l'ignore mais peu importe car ce n'est pas du passé dont elle me parle. D'ailleurs elle se fout pas mal du temps. Elle me parle de moi. Elle a donc tout pour me plaire. Je vois un prêtre en soutane blanche, sandales sur la pierre, sourire sur les lèvres. Il marche calmement, solennellement. Une cordelette attachée à sa ceinture laisse pendre un petit crucifix. Le prêtre inspire le respect sans aucune crainte. Sans doute est-ce ce sentiment que les textes sacrés nomment "l'amour du christ". Pourquoi donc n'ai-je pas froid ? Nous sommes au cœur de l'hiver, en pleine vague de froid. Il n'y a pas de chauffage et je n'ai pas froid. Une image s'impose. Le prêtre m'émeut de façon bien étrange. Je ressens comme une sorte de tendresse et c'est à ce moment que l'image d'une prostitué s'impose. Jeune et belle, son corps ne lui appartient plus et le prêtre le sait. Il en est triste mais ne le montre pas.

L'église, je le réalise soudain, n'appartient plus au royaume de la foi. La révolution, il ya 220 ans, en a fait un bâtiment communal. Un sentiment de tristesse s'insinue et finit par m'humidifier les yeux. Une forte envie de pleurer, une douleur qui porte un nom : nostalgie. Ai-je contribué à cela ? Ai-je été du côté du mal qui ronge actuellement notre monde en l'entrainant subrepticement vers les ténèbres ? Serait-ce la raison pour laquelle la Lumière est si difficile à retrouver pour moi et qui fait aussi qu'elle m'attire tant. Serait-ce la réponse à la question qui me travaille depuis toutes ses années : pourquoi est-ce difficile de retrouver le chemin de la foi ?

Je n'ai jamais ressenti avec autant de force qu'aujourd'hui ce sentiment de retrouver un pan de ma vie que je n'ai pas pu connaître dans celle-ci. Serait-ce si facile de retrouver la trace de nos vies passées ? J'en devine qui sourient en me lisant. Pourtant, c'est très clair : j'ai été prêtre d'une l'Église chrétienne, mais quand ?

B


Mots-clés : Saint-Didier, vie antérieure, mysticisme, expérience, église


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